Lors des vœux du Collège, le Bourgmestre de Liège, Willy Demeyer, a annoncé sa volonté de ne plus autoriser à l’avenir l’urbanisation de terrains qui n’ont jamais été bâtis.
Le Réseau “Occupons le Terrain” (auquel participe activement la Plateforme Ry-Ponet) a publié une première analyse des déclarations faites par le Bourgmestre de Liège.
Nous rejoignons cette analyse et la reproduisons intégralement ci-dessous.
A lire aussi, l’article “Fini de construire sur les terrains jamais bâtis” de Geoffrey Wolff publié dans le Journal La Meuse le 28 janvier 2023.
Un début de « Stop béton ! » à Liège ?
Today in Liège (le bulletin électronique quotidien d’information locale) le rapporte dans son édition du jeudi 26 janvier 2023 : lors des vœux du Collège, le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer, a annoncé sa volonté de ne plus autoriser à l’avenir l’urbanisation de terrains qui n’ont jamais été bâtis.
Ce serait là un pas de géant pour la Ville de Liège où les promoteurs semblent en permanence aux aguets pour s’emparer d’espaces verts constructibles afin d’y développer des projets immobiliers en tous genres. Une série de victoires ont été remportées récemment contre de tels projets qui auraient mis à mal bois, prairies et terres utiles à l’agriculture (Bois L’Évêque et Bois d’Avroy à Cointe, rue des Cabayes à Jupille,…). Ces refus de permis faisaient suite à de fortes mobilisations des habitants et des collectifs locaux mais ils étaient sans aucun doute déjà des indications d’une évolution progressive des autorités communales sur cette question.
La volonté du Collège est désormais de donner la priorité au tissu déjà bâti et situé le long de la vallée, à proximité des transports en commun (gares, tram, bus). On ne peut que se réjouir d’un tel changement de cap de la Ville de liège… mais on attendra encore un peu avant de sortit les fûts de bière (ou de jus de pommes bio) parce que certaines formulations restent ambiguës.
D’une part, dans sa nouvelle vision de l’urbanisation, le Collège invite les promoteurs à proposer des projets de requalification de friches et de l’habitat vertical. Si la première proposition est excellente, la deuxième suscite quelques inquiétudes. La rehausse de bâtiments existants est, elle aussi, une solution intéressante mais l’habitat vertical peut aussi signifier un feu vert à la construction de tours, ce qui est nettement plus problématique. Ce n’est pas un pur fantasme : les projets de tours commencent à sortir des cartons, que ce soit celle du nouveau quartier de Coronmeuse (en cours de construction mais dont le promoteur veut augmenter la hauteur) ou celle de l’entrée du quartier des Vennes (encore en projet et qui devrait dépasser 100 mètres de hauteur !).
Dans tous les cas, il s’agira d’être vigilant quant à la manière dont les projets vont être menés. Il faudra en effet éviter la construction de quartiers monofonctionnels ou encore de mastodontes dévastateurs en termes d’appropriation de l’espace public et de cadre de vie. Mais il faudra également être attentifs à ce que ces nouveaux logements ne soient pas destinés uniquement à des propriétaires très aisés provoquant hausses de prix aux alentours et expulsion progressive des populations à plus bas revenus hors de ces quartiers devenus « tendance » comme à Bruxelles et Anvers.
D’autre part, même si le Collège a maintenant la volonté de préserver les zones agricoles, vertes ou naturelles même si elles sont urbanisables au plan de secteur, l’article de Today in Liege mentionne que le Collège communal annonce, « qu’il ne laissera pas se construire n’importe quoi » (très bien !) et que « sa volonté, telle qu’affichée, est de n’accepter que des projets de qualité acceptés par la population ». Comme on ne connaît pas beaucoup de promoteurs qui présentent un projet en reconnaissant d’entrée de jeu qu’il est très mauvais, le jugement sur la « qualité » du projet restera donc du domaine des autorités communales. Quant à « l’acceptation par la population », elle montre bien que, même avec la nouvelle orientation présentée par le bourgmestre, la vigilance des habitants et des collectifs restera essentielle pour contrer des projets dangereux !
Enfin, une de nos autres préoccupations, et non des moindres, est l’absence de révision du nombre de logements à construire. En effet, l’objectif de création de nouveaux logements reste celui défini en 2018 par le Schéma de Développement de l’Arrondissement de Liège (qui regroupe 24 communes), soit 45.000 nouveaux logements à créer dans l’arrondissement entre 2018 et 2035, dont 15.000 dans la seule ville de Liège. Or, ces chiffres reposent sur des prévisions d’accroissement de la population qui sont aujourd’hui complètement démenties par les faits. Car, sur base des données actuelles, l’augmentation de la population dans l’arrondissement serait en 2035 approximativement le quart de ce qui avait été prévu en 2018 !). Or, il n’y a visiblement aucune volonté de la part des diverses autorités communales de réexaminer ces chiffres et les objectifs de création de logements… ce qui laisse la porte ouverte à un ballet incessant de projets de construction de nouveaux quartiers et lotissements orchestré par les promoteurs.
Ajoutons encore que tant ce Schéma que ces nouvelles déclarations passent sous silence la nécessité de procéder prioritairement à la rénovation et à la réhabilitation des milliers de logements existants mais actuellement inoccupés (3.000 rien qu’à Liège selon les estimations).
Bien que cette déclaration soit un véritable pas en avant dans la politique d’aménagement du territoire de la Ville de Liège, il est donc nécessaire de rester vigilant. On attend avec beaucoup d’impatience et d’intérêt le projet de Schéma de Développement communal qui doit intégrer ces nouvelles perspectives et qui devrait être présenté dans les prochaines semaines (ou prochains mois ?) à la population pour qu’elle puisse donner son avis avant que le Conseil communal prenne une décision définitive.