Le Plan de Secteur n’a pas toujours le dernier mot !
« Cette parcelle est en zone constructible au Plan de Secteur. Donc, elle finira nécessairement par être bâtie. Et il vaut mieux que ce soit par moi avec mon beau projet d’éco-quartier que par un de mes concurrents qui n’a pas la même fibre écologique que moi. » – MS
Ce discours, tous les habitants d’un quartier ou d’un village proche d’un terrain convoité par un promoteur l’ont certainement déjà entendu de la bouche de celui-ci.
Et, à survoler l’histoire du Plan de Secteur – en résumé : un document vieux de 40 ans dans lequel des zones importantes sont ouvertes à la possibilité d’y construire lotissements, entreprises, centres commerciaux et ouvrages routiers ; au fil du temps, des modifications au plan ayant essentiellement conduits à créer de nouvelles zones de ce type ; aujourd’hui, un étalement urbain devenu insupportable – la situation pourrait sembler bien déprimante et donner raison à l’ambitieux promoteur.
Ce serait oublier deux choses.
La première est qu’il ne suffit pas que la zone concernée soit en zone d’habitat au Plan de Secteur pour qu’un promoteur puisse y construire n’importe quoi et n’importe comment.
Pour bâtir, il faut d’abord obtenir un permis (un permis d’urbanisme ou un permis d’urbanisation) selon les modalités prévues par le Code du Développement du Territoire (CoDT) qui rappelle en son 1er article que « le territoire de la Wallonie est un patrimoine commun de ses habitants » et que l’objectif du Code est « d’assurer un développement durable et attractif du territoire ».
Tout projet de construction doit donc satisfaire à toutes les contraintes définies, au niveau wallon, par le Code du Développement Territorial, le Code de l’Environnement, le Guide régional d’Urbanisme, le Schéma de Développement du Territoire, ainsi que par les éventuels Schémas de Développement des provinces, des arrondissements et des communes, et surtout les diverses réglementations de la commune concernée en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire.
Les administrations et les autorités au niveau communal et régional ont donc une large gamme de mesures à leur disposition pour bloquer ou faire modifier des projets qu’elles jugeraient inadaptés.
L’action collective est décisive
Et la deuxième, la plus importante, c’est que les habitants et les citoyens peuvent se mobiliser et se faire entendre. C’est même souvent le facteur décisif. D’une part, le vécu et l’expérience des habitants contredisent souvent les prétentions des promoteurs. Un terrain défini comme « constructible » il y a 30 ou 40 ans s’est souvent développé en poche de biodiversité, en lieu de jeu et de promenades, en zone de culture maraîchère, … dont la disparition pèserait lourd sur la vie des habitants et sur l’environnement. D’autre part, les annonces des promoteurs présentant leurs projets comme des petits coins de paradis sur terre cachent bien souvent d’énormes problèmes de mobilité, d’écoulement des eaux, …
La mobilisation des habitants, notamment par une participation massive et argumentée lors des enquêtes publiques, peut conduire les autorités publiques à réaliser à quel point un projet est rejeté par la population de leur commune et des environs… et à quel point cette opposition pourrait avoir des conséquences désagréables pour leur résultat aux prochaines élections communales. Ce qui ne manque pas de les stimuler pour trouver les arguments administratifs et légaux permettant de « geler » une situation (c’est-à-dire de rendre inconstructibles dans la pratique des terrains présentés comme constructibles dans le Plan de secteur) ou au moins d’exiger du promoteur des changements substantiels (et souvent coûteux) à son projet… voire à exercer une « amicale » pression sur le promoteur pour qu’il abandonne son projet.
Toute l’expérience de la Plateforme Ry-Ponet – et, bien au-delà, celle des dizaines de collectifs liés au réseau Occupons le Terrain – montre que cette force collective des habitants et des citoyens est un élément décisif pour surmonter (ne serait-ce que partiellement et temporairement) les faiblesses du Plan de Secteur. Et elle peut devenir un élément décisif pour forcer des modifications indispensables à ce Plan.
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